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CHAPITRE VII.

C’est, ô Religieux, comme s’il y avait ici une épaisse forêt de cinq cents Yôdjanas d’étendue, et qu’une grande troupe de gens y soit réunie, et qu’à leur tête se trouve un guide pour leur enseigner le chemin de l’île des joyaux, un guide éclairé, sage, habile, prudent, connaissant les passages difficiles de la forêt, et que ce guide s’occupe à faire sortir de la forêt cette réunion de marchands. Cependant, que cette grande troupe de gens, fatiguée, épuisée, effrayée, épouvantée, parle ainsi : Sache, ô vénérable guide, ô vénérable conducteur, que nous sommes fatigués, épuisés, effrayés, épouvantés, et cependant nous n’avons pas encore atteint le terme de notre délivrance ; nous retournerons sur nos pas, il y a trop loin d’ici [à l’extrémité] de cette forêt. Qu’alors, ô Religieux, ce guide habile dans l’emploi des divers moyens, voyant ces hommes désireux de retourner sur leurs pas, se livre à cette réflexion : Ces malheureux ne parviendront pas ainsi à la grande île des joyaux ; et que, par compassion pour eux, il mette en usage l’habileté dont il dispose. f. 105 a.Qu’au milieu de cette forêt, il construise une ville, effet de sa puissance magique, dont l’étendue surpasse cent ou deux cents Yôdjanas ; qu’ensuite il s’adresse ainsi à ces hommes : N’ayez pas peur, ne retournez pas en arrière. Voici un grand pays, il faut vous reposer ; faites-y tout ce que vous avez besoin de faire ; arrivés au terme de votre délivrance, fixez ici votre séjour. Ensuite, quand vous serez délassés de vos fatigues, celui qui y aura encore affaire ira jusqu’à l’île des joyaux, jusqu’à la grande ville.

Qu’alors, ô Religieux, les gens qui se trouvaient dans la forêt soient frappés d’étonnement et de surprise : Nous voici sortis de cette épaisse forêt ; arrivés au terme de notre délivrance, nous fixerons ici notre séjour. Qu’alors, ô Religieux, ces hommes entrent dans cette ville produite par une puissance magique, qu’ils se croient arrivés au but, qu’ils se croient sauvés, en possession du repos ; qu’ils pensent ainsi : Nous voici calmes. Qu’ensuite le guide voyant leur fatigue dissipée, fasse disparaître cette ville produite par sa puissance magique, et que l’ayant fait disparaître, il s’adresse ainsi à ces hommes : Marchez, amis, voici la grande île des joyaux tout près d’ici ; cette ville n’a été construite par moi que pour servir à vous délasser.

f. 105 b.De même, ô Religieux, le Tathâgata, vénérable, etc., est votre guide et celui de tous les êtres. En effet, ô Religieux, le Tathâgata vénérable, etc., réfléchit ainsi : Il faut ouvrir un chemin à travers cette grande forêt des douleurs,