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NOTES.

la forme moyenne. Je remarque en effet que samâna ne se rencontre jamais qu’après des adjectifs, exactement à la place où paraît san dans le style des commentateurs brahmaniques. En voici un exemple très-caractéristique que j’emprunte au Sâmaññaphala sutta, dont on trouvera la traduction au no II de l’Appendice. Le roi Adjâtaçatru rappelant que des Brahmanes réputés savants n’ont pas pu répondre à une question qu’il leur avait proposée, s’exprime ainsi : Katham̃ hi nâma sandiṭṭhikam sâmaññaphalam puṭṭhô samânô vikkhêpam̃ vyâkarissati. « Comment étant interrogé sur le résultat général et prévu, exposera-t-il une doctrine de perplexité[1] ? J’en ajoute ici une seconde preuve : un jeune homme dont les parents sont tombés dans la misère, vient d’entendre de la bouche de Çâkyamuni l’exposition du Sutta qui a pour titre Mâtapôsaka, « celui qui nourrit sa mère, » et touché de la morale charitable qui en forme le but, il se dit à lui-même : Idânim̃ pana pabbadjdjitô samânô mâtâpitarô pôsissâmi. « Mais aujourd’hui étant Religieux, je nourrirai mes parents[2]. » Ici samânô signifie sans aucun doute étant, et la glose barmane ne laisse sur ce point aucune incertitude, puisqu’elle remplace ce terme pâli par phratch lyak, « si je suis, étant. » Le doute n’est pas plus possible en ce qui touche l’exemple suivant que j’emprunte au Sônadaṇḍa sutta : Samâṇô khalu bhô gôtamô daharô samânô susukâlakêsô bhadrêna yôbbanêna samannâgatô paṭhamêna vayasâ agârasmâ anagâriyam̃ pâbbadjdjitô. « Certainement le Samaṇa Gôtama, étant tout jeune, ayant les cheveux parfaitement noirs, étant doué d’une jeunesse fortunée, est sorti de la maison dans la fleur de l’âge, pour se faire Religieux[3]. » Il paraît même qu’on rapprochait volontiers samâna à la forme moyenne de santa à la forme active ; car je trouve dans la curieuse dispute du jeune Ambhaṭṭha, disciple de Pôkkharasâdi, avec Çâkyamuni, la phrase suivante où il reproche aux Çâkyas de ne pas honorer les Brahmanes : Ibbhâ santâ ibbhâ samâna na brâhmanô sakkarônti. « Étant riches, se trouvant riches, ils ne traitent pas honorablement les Brahmanes[4]. » Si cette forme curieuse était reconnue authentique, ce serait un fait nouveau à ajouter au chapitre déjà si riche de M. Bopp, sur la théorie des participes dans les langues ariennes[5]. L’Abhidhâna ppadîpikâ confirme du reste cette explication de samâna, sinon au point de vue grammatical, du moins quant au sens, puisqu’aux significations de semblable, seul, qu’il assigne à samâna, il ajoute celle de santê (pour le sanscrit sati), « étant, existant[6]. » Il est vrai qu’en comparant l’Abhidhâna ppadîpikâ avec l’Amarakocha, on pourrait interpréter santê par vertueux[7] ; cependant Clough, ne donne pas ce sens. J’ajouterai pour l’intelligence du dernier exemple cité, que le pâli ibbha doit répondre au sanscrit ibhya, « riche, opulent, » que Weber a cité d’après le Tchhândôgya upanichad[8].

f. 157 b St. 60. Il les voit assis sur un trône.] J’avais suivi la leçon du seul manuscrit que je

  1. Sâmaññaphala sutta, dans Dîgh. nik. f. 16 a.
  2. Suvaṇṇasâma djâtaka, man. Bibl. nat. f. 6 b, p. 43 de ma copie.
  3. Sônadanda, dans Dîgh. nik. f. 33 b.
  4. Ambhattha sutta, dans Dîgh. nik. f. 24 b.
  5. Vergleich. Grammatik, p. 1100 et suiv.
  6. Âbhidhâna ppadîpikâ, l. III, chap. iii, st. 138 ; Clough, p. 120.
  7. Amarakocha, l. III, chap. iv, sect. 18, st. 130 ; Wilson, Sanscr. Dict. au mot samâna.
  8. Tchhând. upanich. dans Roer, Bibl. Ind. t. II, p. 80 ; Weber, Ind. Stud., t. I, p. 255 et 476.