Page:Caro - George Sand, 1887.djvu/197

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dont elle avait fait une constante étude, ou d’une manière plus large, la nature, qu’elle n’avait pas cessé de contempler des yeux de son corps et de son esprit. Un problème d’histoire naturelle la passionnait, elle ne le quittait pas qu’elle ne l’eût résolu, et pendant tout le temps qu’elle en poursuivait la solution, rien n’existait plus pour elle. Il lui arrivait, par exemple, pendant des mois entiers, de s’occuper de recherches de ce genre avec son fils Maurice, qui en était épris de son côté ; elle n’avait plus dans sa cervelle que des noms plus ou moins barbares. Dans ses rêves, elle ne voyait que prismes rhomboïdes, reflets chatoyants, cassures ternes, cassures résineuses ; ils passaient des heures entières à se demander : « Tiens-tu l’orthose ? — Tiens-tu l’albite ? » Elle avait, au lendemain de ces orgies scientifiques, toutes les peines du monde à se remettre à la vie ordinaire et à ses besognes accoutumées ; mais elle y revenait avec plus de force. D’autres fois, c’était la botanique qui la possédait : « Ce que j’aimerais, ce serait de m’y livrer absolument ; ce serait pour moi le paradis sur la terre. » N’était-ce pas encore un travail de ce genre que ces excursions annuelles qu’elle entreprenait à travers la France ? « J’aime à avoir vu ce que je décris. N’eussé-je que trois mots à dire d’une localité, j’aime à la regarder dans mon souvenir et à me tromper le moins que je peux. » Elle avait une manière à elle de regarder la nature, silencieusement. Mais ce silence était actif ; elle absorbait chaque détail présent devant ses yeux, et l’emportait