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Page:Champfleury - Grandes Figures d’hier et d’aujourd’hui, 1861.djvu/266

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Brawer ; nous admirons leurs buveurs, leurs fumeurs ; mais, au moins, savaient-ils se restreindre dans de petites toiles ; leurs buveries, leurs actions communes et leurs mangeailles se passaient dans de petits cadres. »

Les Espagnols, Murillo et Velasquez en tête, ont peint des mendiants, des pouilleux, des culs-de-jatte de la même taille que les grands et infantes d’Espagne ; les Fêtes de famille où on crie : « Le roi boit ! » où on chante, où on joue de la musette, où on se détourne de table, quand la digestion est pénible, sont de grandeur naturelle.

Nous avons au Louvre un chef-d’œuvre, le Prix de l’arc, de Van der Helst : c’est le portrait de trois échevins qui tiennent en main des vases d’or qu’ils vont distribuer au plus adroit tireur d’arc. Ce petit tableau de chevalet n’est que la réduction d’une toile de Van der Helst, qui a la taille du tableau de l’an passé de M. Courbet, une Après-dîner à Ornans. Au Musée d’Amsterdam, en face de la Ronde de nuit, de Rembrandt, se voit une immense peinture de Van der Helst, qui représente les bourgmestres de la ville discutant entre eux. Ce tableau est plus grand que celui de M. Courbet. Pourquoi les sots ne connaissent-ils pas la peinture de Van der Helst ? Car telle est leur science, égale à leur sentiment. Ignorants, niais et raisonneurs !

On dira que les bourgmestres et les échevins d’Amsterdam sont des gens importants ; mais le maire d’Ornans, l’adjoint d’Ornans, le substitut du juge de paix d’Ornans, le curé d’Ornans, le chien d’un rentier d’Ornans, n’ont-ils pas l’importance historique de bourgmestres et d’échevins flamands ? Dans cinquante ans on ne