Aller au contenu

Page:Chapman - Les Aspirations, 1904.djvu/13

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
8
les aspirations


— Depuis quinze cents ans le Christ sur le Calvaire
Avait donné son sang pour racheter la terre,
Et du globe pourtant une seule moitié
Savait le nom si doux du Dieu crucifié.
Quinze siècles durant sa parole féconde
Avait incessamment vibré pour l’ancien monde,
Si souvent submergé par des fleuves de sang,
Et son écho suave allait s’affaiblissant
À travers les brouillards du sophisme et du doute.
Bien des peuples semblaient avoir perdu leur route,
Qu’éclairaient les seuls feux sinistres des bûchers.
Les cœurs partout prenaient l’âpreté des rochers,
Et le siècle était prêt, entre mille ruines,
À recevoir le grain funeste des doctrines
Dont la Réforme allait ensemencer les cœurs ;
Et l’Europe, où grondaient tant de sourdes rancœurs,
Où survivait toujours l’antique servitude,
Se mourait de débauche et de décrépitude.
Lasse, désespérée et jamais en repos,
Sans guides, sans compas, sans jalons, sans drapeaux,
N’osant plus élever ses yeux vers quelque cime,
La caravane humaine allait vers un abîme