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154 OEuvRES DE Descartes. i97-'98-

nanl l'habit d'vn Théologien, ie mettraj' en auanl les Jcriipules qu'vn homme de cette robe pouroit rencontrer en tout cet ouurage.

De la nature de l'esprit humain.

La première choje que ie irouue icy digne de remarque, ejl de voit que Moniteur Des-Cartcs ejîablijj'e pour fondement & premier principe de toute fa phi lofophie ce qu'auant luy Saint Augujtin, homme de très- grand efprit & d'vne finguliere doârine, non feulement en matière de Théologie, mais aujji en ce qui concerne l'humaine philofophie, auoii pris pour la ba^e & le foulien de la ftenne. Car, dans le Hure fécond du libre arbitre, chap. 3, Alipius difpulant auec Euodius, | d'- l'oulanl prouuer qu' il y a vn Dieu : Premièrement, dit-il, ie vous demande, afin que nous commencions par les choies les plus manifeltes, fça- uoir : fi vous efi;es, ou fi peut-eftre vous ne craignez point de vous méprendre en répondant à ma demande, combien qu'à vray dire li vous n'eftiez point, vous ne pouriez iamais eitre trompé. Aufquelles paroles reuiennent celles-cj' de nojîre auteur : Mais il y a vn ie ne Içay quel trompeur tres-puiflant & tres-ruzé, qui met toute Ion in- duftrie à me tromper toufiours. Il elt donc fans doute que ie fuis, 260 s'il I me trompe. Mais pourfuiuons, & afin de ne nous point éloigner de nojîre fujei, voyons comment de ce principe on peut conclure que nq/lre efprit efi dijlinàl ôfeparé du corps.

Je puis douter fi i'ay vn corps, voire mefme ie puis douter s'il y a aucun corps au monde, & neantmoins ie ne puis pas douter que ie ne fois, ou que ie n'exi/te, tandis que ie doute, ou que ie penfe.

Doncques, moy qui doute & qui penfe, ie ne fuis point vn corps : autrement, en doutant du corps, le douterois de moy-mefmc.

Voire meftne, encore que ie foutienne opiniajîrement qu'il n'y a aucun corps au monde, cette vérité neantmoins fubjifie toufiours, ie luis quelque choie, & partant, ie ne fuis point vn corps".

Certes cela efi fublil ; mais quelqu'vn poura dire [ce que mefnc nofire auteur s'obieâe) : de ce que ie doute, ou mefme de ce que ie nie qu'il y ait aucun cot'ps, il ne s'enfuit pas pour cela qu'il n'y en ait point.

Mais aulTi peut-il arriuer que ces chofes mefmes que ie fupofc n'ellre point, parce qu'elles me font inconnues, ne font point en effect différentes de moy, que ie connois. le n'en fçay rien, dit-il, ie ne difpute pas maintenant de cela. le ne puis donner mon iugement

a. Non à la ligne {1", 2' et 3' édit.).

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