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��Principes. — Première Partie. 3 5

qu'il eft, autant que le permet la foibleffe de noftre nature. Car, faifant reflexion fur l'idée que nous auons naturellement' de luy, nous voyons qu'il eft éternel, tout connoiffant, tout puiffant, fource de toute bonté & vérité, créateur de toutes chofes, & qu'enfin il a en foy tout ce en quoy nous pouuons reconnoiftre... quelque per- fedion infinie, ou bien qui n'eft bornée d'aucune imperfedion.

23. Que Dieu n'eft point corporel, & ne connoit point par Vayde des fens comme nous, & n'eft point Autheur du péché.

Car il y a des chofes dans le monde qui font | limitées & en quelque façon imparfaites, encore que nous remarquions en elles quelques perfeftions ; mais nous conceuons aifement qu'W n'eft pas poftlble qu'aucunes de celles-là foient en Dieu. Ainfi, pource que l'extenfion conftituë la nature du corps, & que ce qui eft eftendu peut eflre diuifé en plufieurs parties, & que cela marque du deffaut, nous concluons que Dieu n'eft point vn corps. Et bien que ce foit vn aduantage aux hommes d'auoir des fens, neantmoins, à caufe que les fentimens fe font en nous par des impreftions qui viennent d'ailleurs, & que cela témoigne de la dépendance, nous concluons aufli que Dieu n'en a point; mais qu'il entend & veut, non pas encore comme nous par des opérations aucunement différentes, mais que touf-jours, par vne mefme & tres-fimple adion, il entend, veut & fait tout, c'eft à dire toutes les chofes qui font en effet ; car il ne veut point la malice du péché, pource qu'elle n'eft rien.

■24. Qu'après avoir connu que Dieu eft pour pajfer à la connoiffance des créatures, il fe faut fouuenir que noftre entendement eft finy, & la puiffance de Dieu infinie.

Apres auoir ainfi connu que Dieu exifte & qu'il eft l'autheur de tout ce qui eft ou qui peut eftre, nous fuiurons fans doute la meil- leure méthode dont on fe puiffe feruir pour decouurir la vérité, fi, de la connoiflance que nous auons de fa nature, nous palfons à l'explication des chofes qu'il a créées, & fi nous | eflayons de la 18 déduire en telle forte des notions qui font naturellement en nos âmes, que nous ayons vne fcience parfaite, c'eft à dire que nous connoif- fions les effets par leurs caufes. Mais, afin que nous puiftlons l'en- treprendre auec plus de fureté..., nous nous fouuiendrons. toutes

a. « Nobis ingenitam. « 

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