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Page:Desforêts - Le p’tit gars du colon, 1934.djvu/59

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veillée d’hiver

Et l’on jasa. Il revenait de chez ; le vieux Ménard, tout au bout du rang.

— Alors, bien malade, le vieux ?

— Oui… non… le poids des années, le froid glissant par les murs de bois rond… et tout un passé de ces fatigues journalières, oubliées, et qui d’un coup, vous reviennent, au soir de l’existence, pour endormir du long sommeil.

Un silence.

— Braves colons, braves gens, reprit le pasteur ému, vous tous qui défrichez ; nos plaines, et semez, les blés nouveaux.

— Monsieur le Curé, interrompit Gaudreau, ce sont vos paroles, ce sont vos prières, c’est votre bénédiction, portée de foyer en foyer, qui soutient l’œuvre commune et la fait prospérer.

— C’est le bon Dieu, remarqua le prêtre.

— Mais c’est vous son représentant, monsieur le curé, insista la mère.

— C’est vrai, ma bonne dame, acquiesça l’abbé, puis, souriant, et par manière de digression : « Mais que vous auriez tous mieux aimé le curé Hébert !…

— Tiens, pensa étourdiment à haute voix Théodule, Hébert… Hébertville : ça fait bien.

— Tais-toi, le petit garçon, gronda le papa.

Il se tut, rougit, courba le front, s’absorba dans les pièges aux lièvres blancs, qui, plus heureux, ne pensent jamais à rien.