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Page:Desforêts - Le p’tit gars du colon, 1934.djvu/62

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le p’tit gars du colon

surtout, les jeunes, que rien de stable et de prospère ne s’établit sans la croix et la souffrance. Vous devinez s’ils en eurent, des sacrifices et de la misère, nos premiers Hébertvilliens ! Vous le raconter serait trop long… Il se fait tard… Je voulais, en passant, vous saluer… et me réchauffer.

Il se levait, s’enveloppait frileusement de son épaisse capote de poil :

— Brrrou ! ce qu’on va regeler dehors !

— Monsieur le curé, hasarda Aimé, s’en fait-il encore, des paroisses neuves ?

— Mais sans doute, un peu partout dans notre province, et dans le Canada entier ; les beaux terrains inoccupés ne manquent pas, je vous assure.

Souriant, le bon prêtre ajouta :

— Et quand Hébertville n’aura plus de lots vacants, on essaimera d’ici vers le nord. C’est la conquête des moissons sur la forêt, la marche en avant de la colonisation. Et voilà : qui de vous, alors, en sera, de la fondation nouvelle ?

— Moi… chanta la voix claire du petit François, tout surpris, le premier, de l’exclamation.

Qu’avait-il compris de la question ?

On rit, comme à l’arrivée, le rire spontané des cœurs simples ; le curé souhaita le bonsoir, ouvrit la porte avec précaution et s’enfonça dans la nuit d’hiver.