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cet hérétique et de Tertullien il y eût eu véritablement une lettre de saint Paul aux Laodicéens, Marcion n’eût pas osé donner ce titre à celle aux Éphésiens, et que Tertullien n’eût pas manqué de lui opposer la véritable lettre écrite aux Laodicéens.

Cependant sur cette supposition, que saint Paul avait écrit une lettre aux Laodicéens, quelques hérétiques se sont avisés d’en composer une sous ce nom ; mais elle a été rejetée par les anciens Pères comme étant remplie d’erreurs, ainsi que l’assurent saint Jérôme (Lib. de script. eccles.)[1], en parlant de saint Paul, chap. v, tom. IV, pag. 103), et Philastre (lib. vi De hæres,, cap. 90[2], en ajoutant que quoiqu’elle fût lue par quelques-uns des fidèles, elle n’était point reçue dans l’Église ; et c’est apparemment la même dont saint Epiphane parle (Hæres. 42, vers la fin), au sujet des Marcionites, de laquelle il dit qu’elle était composée de plusieurs morceaux extraits des autres épîtres de saint Paul, et remplie de plusieurs erreurs. Ce n’est pas assurément celle-là que nous donnons ici au public, mais une autre qui paraît visiblement avoir été composée par quelques catholiques animés d’un faux zèle, qui, sous le même titre, ont emprunté des autres épîtres de l’Apôtre les mêmes expressions, s’imaginant qu’il leur était permis de réfuter l’imposture des hérétiques par d’autres impostures ; et c’est cette lettre qui est citée par quelques Pères plus récents, et surtout par saint Anselme ; c’est la même que Sixte de Sienne a donnée tout entière dans sa Bibliothèque (lib. 11, pag. 92), en parlant de saint Paul, et qui se trouve insérée dans plusieurs Bibles d’Allemagne. En effet, on y voit une affectation manifeste d’y avoir inséré ces paroles du verset 16 du chapitre iv de l’Épître aux Colossiens, mais dans un autre sens, afin d’établir la vérité de cette lettre Ayez soin de communiquer cette lettre aux Colossiens, et de lire vous-mêmes celle que je leur ai écrite. Outre cela, l’auteur y copie presque mot pour mot les expressions de l’Apôtre, et prend le même titre qu’il a donné à l’Épître aux Galates, chapitre 1, 1. Il affecte aussi de prévenir les Laodicéens contre les faux docteurs qui voulaient les détourner de la doctrine qu’on leur avait enseignée dans la lettre aux Colossiens, chapitre 1, 4 et 8. II Parle de ses liens de la même manière que fait l’Apôtre, chap. 1, 24 et 29, et chap. IV, 18, afin que ces circonstances convinssent à l’époque et au temps auquel cet Apôtre avait écrit aux Colossiens ; il rapporte même presque mot pour mot ce qu’il dit sur le mépris de pre vie au chap. 1, 21 de sa lettre aux Philippiens ; répétitions dont on trouve peu d’exemples dans les épîtres de cet Apôtre ; car quoique l’on y voie toujours une conformité entière dans ses sentiments, on n’y aperçoit point qu’il se soit ainsi copié lui-même termes pour termes et paroles pour paroles.

Quoique toutes ces raisons prouvent que cette lettre est supposée, cependant, comme elles ne contient rien qui ne soit très édifiant, il n’y a pas de raisons pour la rejeter absolument, puisqu’elle peut au moins servir à établir les raisons qui ont obligé l’Église à ne la pas admettre aux nombre de ses écritures canoniques, et à la rejeter entre celles qu’on nomine apocryphes.

Nous pouvons ajouter que Fabricius qui a inséré en grec et en latin l’épître qui nous occupe dans son Codex apocryphus Novi Testamenti, t. I, l’a fait précéder d’une dissertation où il réunit et discute ce qui a été dit à l’égard de cette production.

Parmi les Pères qui en ont parlé, on distingue Théodoret (Commentar. ad Coloss. IV, 16), saint Grégoire le Grand, (in Job, c. 15), saint Thomas d’Aquin qui dit au sujet de cette épître et de la troisième aux Corinthiens : Ratio est duplex quare non sunt « in canone, quia non constabat de eorum. auctoritate, quia forte erant depravatæ et perierunt in ecclesiis, vel quia non continebant aliud quam ista. »

Les critiques modernes (entre autres, Bellarmin, De script. eccles. et Tillemont, Mémoires, t. I) regardent cette épître comme supposée, mais quelques-uns doutent si le texte que nous possédons est bien celui de l’ouvrage dont les anciens auteurs ont fait mention. De fait, c’est à peu près un centon composé, en majeure partie, de passages pris dans les épfires authentiques de saint Paul.

On trouve d’ailleurs cette lettre dans le Novum Testamentum x11 linguarum, publié par Hutter à Nuremberg, 1699. Elle est aussi dans la Polyglotte de Reineccius, Leipzig, 1747, in-fol., p. 937, et dans divers autres ouvrages. Voir aussi Michaelis, Einleitung in das N. Test., II, 1281 ; de Wette, Lehrbuch der Enleitung in die Kanonischen Buecher des Neuen Testaments ; Schneckenburger, Beitrage zur Einleitung ins N. T., p. 153 (cinquième édition, Berlin, 1848, p. 249), la dissertation spéciale de Wieseler, Progr. de epist. Laodicena, Gottingen, 1844, mais il ne faut pas oublier que tous ces ouvrages sont écrits par des piotestants ; on ne les consultera donc qu’avec réserve.


    habemus emissam, non ad Laodicenos. Sed Marcion ei titulum aliquando interpolare gestiit, quasi et in isto diligentissimus interpolator. Nihil autem de titulis interest, cum ad omnes apostolus scripserit, dum in quosdam. › (Ibid., c. 17.)

  1. Legunt quidam et ad Laodicenses, sed ab omnibus exploditur.
  2. Sunt alii quoque qui Epistolam Pauli ad Hebræos non asserunt esse ipsius, sed dicunt aut Barnabæ esse apostoli, aut Clementis de urbe Roma episcopi. Alii autem Lucæ Evangelistæ aiunt Epistolam etiam ad Laodicenses seriptam. Et quia addi ́derunt in ea quædam non bene sentientes, inde non legitur in Ecclesia, et si legitur a quibusdam, non tamen in Ecclesia legitur populo, post tre : ecim Epistolæ ipsius et ad Hebræos.