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LE COMMERCE ET LA VIE

il s’est malheureusement ensablé. Maintenant les grands navires ne peuvent atterrir en vue de la ville que les années de crue exceptionnelle ; néanmoins tous les ans un service d’allèges fonctionne encore entre Kabara et Tombouctou pendant les hautes eaux.

Leur lieu d’atterrissement est au sud-ouest, à peu de distance de la grande mosquée. Le marigot vient mourir là en un grand bassin arrondi qui dessine un port à souhait. Vue de ce point, Tombouctou apparaît sous un aspect particulièrement aimable et riant, avec des bouquets de verdure et d’élégants palmiers au premier plan, et rappelle tout à fait l’oasis qu’elle était à ses premiers Jours.

Sur toute cette bordure ouest de la ville, le marigot a en effet formé, par infiltrations souterraines, un chapelet de mares au milieu des dunes. La plus profonde de ces mares a été soigneusement clôturée et sert de citerne ; c’est là que la population vient puiser son eau potable. Un gardien habite à l’entrée et empêche de laver et de se baigner. Et cependant c’est là que Tombouctou a des bains publics. D’une installation inédite et bizarre, il est vrai. Sur les bords de la citerne, en plein air, sont encastrées de grandes Jarres qu’emplissent ceux qui veulent faire leurs ablutions, et à toute heure de la journée on y peut voir toutes les nuances de peau de la terre. Les autres mares servent de lavoir, ou d’abreuvoir pour les chameaux. Leurs bords sont utilisés en jardins où les indigènes cultivent quelques légumes, des pastèques, un peu de tabac et de coton, et les Européens des carottes, des radis, des choux et des salades. Jadis ces mares, qui se continuent plus petites au nord et au nord-est, étaient toutes ombragées de beaux arbres, dattiers, amandiers et autres, et formaient une gaie et verte ceinture autour de la cité. Celle-ci, de même, abritait ses rues et ses places sous de fraiches coupoles de verdure. Malheureusement, à l’époque de l’invasion marocaine, les conquérants eurent besoin de construire une flottille