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SUR LE SOL D’ALSACE

Elle fit un effort et dit :

— Marianne…

Mais l’énergie encore se déroba, entraînée par un sanglot plaintif. Une honte lui vint aussi de se savoir si peu maîtresse chez elle…

— Marianne… pardonne-moi la peine que je vais te causer…

— Mon Dieu ! Louise… qu’y a-t-il ?

— Tu aimes trop notre pays…

— Ah !… et votre mari vous l’a reproché ?…

— Oui… les autres t’ont desservie près de lui.

— Et je dois me taire ?… jamais !…

Devant Louise assise, elle était debout, un bras étendu, les yeux pleins de flammes :

— Jamais ! répéta-t-elle avec force. Personne ne peut m’empêcher de dire tout haut mes sentiments !… Moi, vieille Alsacienne, qui ai vu mon pays libre dans un temps où tout le monde fraternisait !… Les Allemands se croient donc bien forts pour vouloir soumettre les cœurs ?… ou bien faibles pour craindre une pauvre femme de soixante-dix ans bientôt ?… Et c’est pour cela que vous pleurez ?… moi, cela me fait rire !…