Aller au contenu

Page:Fouillée - Descartes, 1893.djvu/41

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
33
LA REVOLUTION CARTÉSIENNE.

divin. La classification n’est plus pour lui l’opération fondamentale de la science : ranger tous les êtres dans leurs groupes respectifs, les hommes dans le groupe de l’humanité, les animaux dans le groupe de l’animalité, ce n’est point avoir pénétré dans la réalité même. Le premier stage de la science, c’est sans doute de définir et de classer les qualités apparentes des choses, comme la couleur, le son, la pesanteur, etc. ; mais, selon Descartes, à quoi tiennent toutes ces qualités ? À nous, non aux choses ; elles ne sont donc pas le véritable objet de la science. Les formes mêmes des choses, comme la forme d’une plante, d’un animal, ne sont que des résultats dérivés, des combinaisons de qualités visibles ou tangibles qui, provenant de nos sensations, ne représentent point la véritable nature des objets. Seules les formes géométriques répondent à quelque chose d’indépendant de nous, mais ces formes sont encore des dérivés du mouvement dans l’étendue. C’est donc, en somme, le mouvement dans l’étendue qui est l’objet véritable de la science. Les genres et les espèces ne sont que des produits extérieurs ; ce qu’il y a de général dans les choses n’existe, au fond, que dans notre pensée. Le nombre même, dit Descartes dans ses Principes, « si nous le considérons en général sans faire réflexion sur aucune chose créée, n’est point hors de notre pensée, non plus que toutes ces autres idées générales que, dans l’école, on comprend sous l’idée d’universel ». Si une pierre tombe vers le centre de la terre, ce n’est pas parce