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Page:Fouillée - Descartes, 1893.djvu/58

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DESCARTES.

en résulte immédiatement que le monde est infini en étendue. Avec quelle mordante ironie Descartes raille ceux qui veulent enfermer l’univers « dans une boule » ! Il implique « contradiction, ajoute-t-il, que le monde soit fini ou déterminé, parce que je puis concevoir un espace au delà des bornes du monde, quelque part que je les assigne ». Autre, d’ailleurs, est cette infinité d’étendue, autre l’infinité de perfection que l’on conçoit « en Dieu seul ». Sur l’éternité du monde dans le passé, Descartes n’ose se prononcer ouvertement, cette opinion sentant trop le bûcher ; mais il est facile de voir quelle est sa pensée de derrière la tête. Pourquoi Dieu aurait-il attendu un certain moment précis pour créer ? Il répugne à la raison, dit quelque part Descartes, de croire que la puissance suprême « soit restée, dans la création, au-dessous de la puissance de notre imagination ». Descartes admet tous les infinis de quantité ; et si on lui objecte qu’il y a alors des infinis plus grands les uns que les autres, comme deux bandes parallèles infinies dont l’une est le double ou le triple de l’autre, il répond, avec une concision et une force admirables : « Pourquoi pas, puisque c’est sous quelque rapport fini que les infinis sont plus ou moins grands ? » Cur non, in ratione finita ?

Le mouvement étant le mode d’existence essentiel à la matière, la matière infinie est nécessairement mue et « enveloppe une infinité de mouvements qui durent perpétuellement dans le monde ; il n’y a