Page:Gautier - Histoire du romantisme, 1874.djvu/48

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des plastiques, nous ne pouvions pas nous empêcher de regretter Zeus à la chevelure ambrosienne relégué sur l’île des Sapins dans la mer du Nord, Aphrodite enfermée sous la montagne du Vénusberg, Ampelos, sommelier d’un couvent de moines, et Hermès, commis de banque à Hambourg.

Cependant nous n’étions pas dénués de sculpteurs qui essayaient d’introduire la vérité dans l’idéal et de rapprocher la beauté de la nature. David d’Angers, célébré par Victor Hugo et Sainte-Beuve dans d’admirables pièces de vers, faisait sa Jeune fille au tombeau de Marco Botzaris, le Philopœmen, ses grands bustes monumentaux, et cette collection de médailles si caractéristiques, qui est comme l’iconographie complète du siècle. Antonin Moine, Préault, Maindron, mademoiselle de Fauveau cherchaient à briser le vieux moule et à donner à l’argile ou à la cire les souplesses de la vie et les frémissements de la passion. Dans notre cénacle, Jehan du Seigneur représentait cet art austère et rebelle à la fantaisie qui, se sentant regardé sous tous ses profils, ne peut rien escamoter ni dissimuler. — La probité du marbre fut toujours obligatoire, et ce n’est pas Jehan, si exact, si consciencieux, qui eût manqué à ce devoir.

Jehan du Seigneur, — laissons à son nom de Jean cet h moyen âge qui le rendait si heureux et lui faisait croire qu’il portait le tablier d’Ervein de Steinbach travaillant aux sculptures du munster de Strasbourg — était un jeune homme d’une ving-