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Page:Gautier - Isoline et la Fleur Serpent, Charavay frères, 1882.djvu/256

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LA TUNIQUE MERVEILLEUSE.

ple lorsqu’il se baisse vers le métier ; je vois votre main mignonne s’élever et redescendre, tirant l’aiguille ou piquant le point. Quelquefois, vous soufflez dans vos doigts engourdis de froid, et je maudis l’infâme avarice de votre père adoptif. Il arrive aussi que vous placez la lampe entre la fenêtre et vous, alors je ne vous vois pas. Ces jours-là je m’éloigne avec des larmes plein les yeux. »

Fleur-de-Roseau, émue et rêveuse, laissa retomber son bras, ne songeant plus à se cacher.

— « Ah ! murmura-t-elle, si j’avais su, pendant ces longues soirées si tristes, que quelqu’un songeait à moi avec tendresse, je n’aurais senti ni le froid qui me glaçait les doigts ni l’ennui qui me rongeait le cœur ! »

Le jeune homme regardait avidement sa cousine qu’il n’avait jamais vue en somme que de profil. Et quel charme nouveau lui donnaient l’éclat du teint et le sombre velours des yeux !

— « Vous êtes plus belle encore que je ne l’avais cru, dit-il d’une voix tremblante ; je n’ose vous demander de me regarder, tant j’ai peur que ma personne vous déplaise.

— Je vous dois un aveu, à mon tour, dit Fleur-