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Page:Gautier - Isoline et la Fleur Serpent, Charavay frères, 1882.djvu/279

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LE FRUIT DÉFENDU.

émues et timides, mordaient le bout de leurs ongles en inclinant coquettement à gauche leurs petites têtes ornées de plumes. Mais la foule était si épaisse et si agitée qu’on ne pouvait admirer longtemps la même chose, et plus d’un acheteur qui marchandait rêveusement un éventail orné de caractères se trouvait tout à coup, cet éventail à la main, devant un étalage de vieilles monnaies et d’armes anciennes, poursuivi par les hurlements du marchand frustré.

Ce vaste amas de promeneurs avait une ondulation molle, un balancement sans cahots, car chaque personne se laissait pousser sans résistance. À la moindre impulsion, venue de près ou de loin, tout le monde obéissait machinalement ; celui qui aurait formé la résolution audacieuse de se diriger vers un but, ou seulement d’aller dans un sens plutôt que dans l’autre, aurait fort risqué de laisser en chemin la meilleure partie de sa toilette et même quelques-uns de ses membres.

Ce double malheur menaçait évidemment le riche et honorable libraire Sang-Yong, héros de cette histoire.

Ce jeune homme de trente ans et sept lunes, d’une tenue irréprochable et d’une figure aimable, semblait