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14 GAZETTE DES BEAUX-ARTS reau divin. La fable d’Europe, enlevée en Phcnicie et portée en Crète par Zeus métamorphosé en taureau, ne diffère de celle de Pasiphaé que par une atténuation de l’élément zoomorphique : le taureau divin y sert seulement de monture à la princesse et la légende lui fait reprendre la figure humaine pour achever sa con¬ quête. Toutes ces traditions, si bizarres qu’elles nous semblent, s’expliquent facilement si l’on admet que les habitants primitifs de la Grèce avaient pour divinités des animaux; le taureau qui aime Europe, le cygne qui aime Léda n’étaient pas, comme pouvait le croire Ovide, Zeus transformé en taureau ou en cygne; c’est le tau¬ reau et le cygne divins qui, avec le temps, ont pris figure humaine, et se sont, si l’on peut dire, transformés en Zeus. L’emplacement du palais de Cnosse a été très anciennement habité, probablement dès l’an 4500 avant J.-C. M. Evans a con¬ staté, au-dessous des constructions monumentales qu’il a déblayées, l’existence d’une couche de débris épaisse de 5 à 7 mètres, qui s’est formée, au cours de longs siècles, par l’effondrement de petites huttes antérieures à la connaissance des métaux. Vers l’an 2500 avant J.-C. commence la période dite Minoenne (de Minos), au cours de laquelle fut construit un premier palais dont on a pu retrouver quelques éléments. Le second palais fut édifié vers l’an 2000, à une époque où l’art du potier et du graveur de gemmes avait déjà atteint un développement remarquable. Le palais lui-même paraît avoir été détruit en partie vers 1500, à la suite d’une invasion d’insu¬ laires qui, depuis longtemps tributaires de l'industrie crétoise, vou¬ lurent s’emparer de ce centre de production et de richesse. Le palais fut reconstruit ou réparé avec soin, car les envahisseurs ou conquérants n’étaient pas des sauvages et participaient à la même civilisation que les vaincus. Un certain nombre d’objets d’art relatifs au culte, qui avaient éprouvé des avaries, furent ensevelis alors dans des espèces de cachettes pratiquées au-dessous des salles du palais. Cela se passa-t-il avant l’invasion ou immédiatement après? Il est difficile de rien décider à cet égard, mais on peut considérer comme certain que les objets découverts dans les cachettes sont antérieurs à l’an 1500 avant J.-C. et appartiennent à 1’ « ancien fonds » du second palais. Cela est encore confirmé par le fait que, dans ces cachettes, la poterie mycénienne caractéristique n’est pas représentée; or, nous savons maintenant que la céramique à décors zoomorphiques et curvilignes, que les fouilles de Schliemann à Mycènes ont révélée en d 876, appartient à la seconde moitié du