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Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/220

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195 GAZETTE DES BEAUX-ARTS de nos cathédrales à la fin du xne siècle ne pensaient guère à ciseler de l'orfèvrerie, et, de fait, nous ne voyons pas qu’ils s’y soient essayés nulle part : le souci des grands ensembles les tourmentait trop. Enfin la disposition des différentes parties s’explique aussi beaucoup mieux ainsi : à la hauteur où ils sont actuellement placés les jolis bas-reliefs intérieurs des pieds-droits sont perdus pour le spectateur. Vus à la hauteur de l’œil dans un enfeu de tombeau ils reprennent toute leur valeur significative1. Un d e ces hasards providentiels qui viennent parfois à la ren¬ contre de nos bonnes volontés impuissantes s’est d’ailleurs chargé d’apporter à cette hypothèse une confirmation que je n’aurais pas osé espérer. Au moment de terminer ce travail, je fus avertie, par la gracieuse initiative de M. Paul Yitry. qu’un morceau de bas-relief roman acheté à Reims2 et semblant offrir avec l’objet actuel de mon étude certaines analogies, se trouvait en dépôt chez un marchand de Paris. Je me rendis immédiatement sur place et ma surprise fut aussi grande que ma joie en constatant dans l’ensemble et dans les plus minutieux détails une évidente parenté entre ce morceau et les parties romanes du portail de Reims. Or, ce fragment est une partie importante (le tiers environ) de ce qui n’a pu être qu’un soubassement de tombeau : la disposition des personnages isolés sous les arcatures, chaussés, et qui portent, en même temps que des phylactères, des crosses dont on aperçoit encore l’amorce, le prouve. Ce sont des évêques faisant partie d’un cortège funéraire. Ce fragment rentre d’ailleurs exactement dans les propor¬ tions du soubassement du tombeau de Rouen. Passons maintenant aux détails. Le morceau, dont je puis pré¬ senter ici une reproduction, comporte trois personnages (dont les têtes sont mutilées ou absentes), debout, séparés par des colonnettes reliées entre elles par des fragments d’arcatures. Les draperies, très voisines de celles de Reims —surtout des grands Anges des écoin- çons et des bas-reliefs latéraux — ne leur sont cependant pas iden- 1. Je ne crois pas qu’il y ait lieu d’attacher d’importance à l’étroitesse relative de la dalle sur laquelle aurait reposé le gisant. D’abord, puisqu'il a bien fallu que tous les éléments de ce décor fussent démontés et remontés, on a pu restreindre la cavité de l’enfeu à la profondeur des bas-reliefs-latéraux. Ensuite, la cavité, à Rouen, n’est pas beaucoup plus considérable : 0mG0 au lieu de OmoO. Enfin, les exemples abondent de tombeaux arqués où la dalle et le gisant débordent feufeu. 2. Le fragment provient de la région de Reims : c’est tout ce qu’une enquête consciencieuse m’a permis d’établir. Un dire plus précis, indiquant Soissons comme origine, n’a pu êlre contrôlé et rencontrerait, d’ailleurs, d’assez sérieuses objections.