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830 GAZETTE DES BEAUX-ARTS admirablement calculée l'art khmer arrive à obtenir, malgré la luxuriance incroyable de ses décors partout multipliés, une impression d’élégance pondérée et d’ordonnance harmonieuse. Quelles figures plus charmantes que celles de ces tévadas ou t\t* anges féminins, sculptées sur les murailles du temple d'Angkor-Vat, la métropole religieuse qui fut la plus grande et la plus merveilleuse de toute l’Indo-Chine ancienne. Placées sur les frises supérieures des soubassements, de place en place, debout, de grandeur naturelle,

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elles semblent être descendues dans l’Edcn enchanté. Les courbures diverses de leurs coiffures originales, qui s’harmonisent avec les ornements du fond et garnissent les côtés du cou, ajoutent l’ampleur et la légèreté aux formes exotiques de ces figures conventionnelles et idéales, groupées par deux ou par trois, se tenant par les mains ou les épaules, plus ravissantes encore que celles isolées au milieu de leurs larges frontons, où des fleurs, des volutes s'enchevêtrent au milieu des motifs sans fin, dont, chose particulière, le masque de Rhéou, divinité du mal, qui forme les centres, exprime toujours, par ses dents écartées et sa face cruelle, un vigoureux effet de contraste apparent, et le sentiment opposé à celui de l’expression pure et se¬ reine de ces chastes divinités. Aux-torses nus, aux jambes couvertes d’étoffes légères brodées d’étoiles et garnies d'ornements, plus fins encore que ceux du fond, accompagnées des formes étranges naissantes à la ceinture, dont on se demande volontiers la signification, qui les vêtent avec am¬ pleur et laissent paraître leurs ensembles sveltes et légers, ces figu res mystiques, imprégnées du caractère qui leur attribue leur signification, s’ofirent toutes différentes des figures de bayadères sculptées en frises décoratives, entourées d’arcs trilobés et de pal- meltcs délicates comme la dentelle et qui contournent les mouve¬ ments de leur danse rythmique. Plus significatif parait le décor intérieur des sanctuaires du temple d’Angkor-Vat, où ces frises de bayadères, sculptées au haut des lambris, sont dorées sur un fond garance semé d’étoiles d’or, et où les parties plafonnantes sont formées d'admirables rosaces épa¬ nouies en relief, dont les pétales dorés se détachent vibrants sur un fond brun foncé, prenant dans la mystérieuse clarté des sanctuaires un indicible aspect de puissance et de légèreté. Chacune de ces ro¬ saces est encadrée par des frises de rosaces plus petites, dont les sail¬ lies sont combinées de telle sorte, que les reliefs concourent, par l’aspect de l’or et du fond, à exprimer la délicatesse des formes, au¬