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LES TAPISSERIES DE MALTE 419 natives de température humide et de chaleur excessive, soit à la suite de l’usage de certains acides corrosifs, employés à leur net¬ toyage. Même en supposant que ces tissus n’aient pas été rongés par des mordants dangereux, l’humidité seule suffit à expliquer l’état de décomposition des fibres. N’avons-nous pas eu, tout dernièrement, la confirmation du mal que le climat variable de Malte et le voisi¬ nage de la mer peuvent causer à des tissus de laine et de soie, quand nous dûmes constater qu’une tapisserie, complètement remise en état depuis deux ou trois ans à peine, était déjà couverte de quantité de taches de moisissure, parce qu’elle se trouvait appliquée contre un mur intérieur tout saturé d’humidité et ne recevant jamais le soleil? La soie était donc comme brûlée; elle tombait en poussière si peu qu’on la frottât avec un corps dur. Des parties entières, qui semblaient intactes, se brisaient au moindre effort, et, comme toutes les lumières, tous les tons clairs sont composés exclusivement de soies, c’était la moiliéou les deux tiers de chaque pièce qu’il s’agissait de tisser à nouveau avec l’aiguille. Si les soies étaient toutes à remplacer dans les bordures comme dans les sujets, les laines foncées avaient, de leur côté, éprouvé de graves détériorations. Généralement, on le sait, dans les tapis d’Orient en laine comme dans les vieilles tapisseries, les noirs, les bruns très foncés sont rongés en quelque sorte, tandis que les bleus, les verts, les rouges, résistent bien mieux. Faut-il attribuer ces résultats à l’usage de certains oxydes, comme l’oxyde de fer, encore employés aujourd’hui dans la composition des couleurs foncées? Les chimistes de la manufacture seraient assez d’avis que l’hypothèse n’offre rien que de vraisemblable. Toujours est-il que, quand il faut remplacer toutes les vigueurs et toutes les lumières d’un tissu, il ne reste plus grand’ohose. C’est ce qui advint pour les tapisseries aux armes de Perellos : ciels, lointains ensoleillés, lumières des feuilles et des fruits, tons brillants des oiseaux, tout tombait en poussière dès que le tissu était soumis à la moindre tension. Et, en même temps, toutes les ombres, toutes les parties foncées des arbres, des nègres, des ani¬ maux, étaient déjà à demi dépouillées avant le commencement du travail. La quantité de soie jaune claire absorbée par les réparations a été considérable. À elles seules, les bordures formées de feuilles d’acanthe dorées ont dévoré des kilogrammes de matière première. Mais ce n’est là encore qu’un petit côté des difficultés et des dépenses d’un travail de cette nature. Le tissu, au point ordinaire des