Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/481

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LES TAPISSERIES DE MALTE 421 plus raide, peut, sans danger, être confié à des mains encore inex¬ périmentées. Mais, en principe, on peut établir comme une règle invariable s'appliquant à tous les ouvrages de cette nature, que si l’on n'est pas disposé à consacrer aux réparations tout le soin nécessaire, mieux vaut respecter les ruines du temps et ne pas toucher aux vieilles tapisseries. Veut-on une preuve décisive des lenteurs du travail de répara¬ tion? Les admirables tapisseries de Y histoire de David et de Bethsabée exposées au musée de Cluny paraissent, même à un amateur un peu attentif, à peu près intactes. C'est à ce point qu'on distingue difficile¬ ment les pièces réparées à fond de celles qui n’ont pas encore été envoyées à l'atelier. Eh bien ! ces travaux si peu apparents, et de prime abord insignifiants, ont exigé, pour chaque pièce, des mois de travail et une dépense de plusieurs milliers de francs. Actuellement, cinq panneaux de la tenture de Malte ont repris leur placç dans le palais de La Valette; ce sont: le Tireur d'arc, Y Ibis, Y Éléphant, le Cheval rayé, le Nègre porté dans un hamac. Le Chas¬ seur au repos, VIndien à cheval et le Cheval isabelle sont arrivés à Paris au milieu de l’année dernière. Pour mener à bonne fin cette grosse opération, il reste le Combat d'animaux où se trouve le tapir et les Deux Taureaux. Ces deux dernières tapisseries sont parmi les plus endommagées. Si cette longue et pénible opération lui adonné beaucoup de peine et de travail, le personnel de notre Manufacture nationale a le droit d’être fier du résultat obtenu; car, nulle part ailleurs, un pareil travail n'eût été possible. On l’a bien vu quand, à Malte, on essaya d’abord d'employer des Italiens inexpérimentés : la pièce qu'ils avaient entreprise s'est trouvée à peu près perdue et il a fallu reprendre tout ce qui avait été exécuté par ces mains téméraires. Et non seulement la supériorité incontestable de l'atelier de rentraiture des Gobelins a reçu en cette circonstance une consécra¬ tion en quelque sorte officielle; mais, de plus, l’initiative heureuse du gouvernement de Malte aura eu ce résultat imprévu de former un atelier d’ouvrières incomparables juste au moment où le Parle¬ ment français allait voter les fonds nécessaires pour remettre en état l’admirable collection de notre mobilier national. Il était certes déjà un peu tard pour entreprendre cette œuvre de salut; on ne saurait s’imaginer à quels traitements barbares ces chefs-d’œuvre ont été condamnés dans le passé; mais, du moins, grâce au vote récent de