Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/529

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JEAN BOURDICHON ET SON ATELIER\t457 dernière main aux œuvres que le maître donnait pour siennes. Il y a dans les six beaux manuscrits que nous avons énumérés plus haut une perfection et un fini dont aucun de ses élèves n’était capable. Nous avons donc le droit de dire qu’ils sont de Bourdichon. L’influence de cet atelier de Tours, le plus important de la fin du xve siècle, me paraît avoir été considérable. Ce pourra être un inté¬ ressant sujet d’étude de rechercher ce que lui doivent les meilleurs miniaturistes de Rouen ou de Paris. Chose curieuse : les sculpteurs eux-mêmes semblent parfois imiter des types créés par Bourdichon. f Que l’on compare le beau buste du Père Eternel que M. Vitry a reproduit dans son livre sur Michel Colombe 1 avec le Dieu le Père des Heures d’Aragon2, on sera surpris de la ressemblance. C’est la même tiare, la même chevelure, la même barbe; c’est surtout la même gravité et la même douceur. Douceur : c’est le mot qui revient sans cesse quand on parle de Bourdichon, aussi bien que des sculpteurs de Tours. Dans cette aimable Totiraine, peintres et sculpteurs semblent avoir vécu en parfaite communauté de senti¬ ments et avoir poursuivi le même rêve de beauté. C’est là que l’art du moyen âge, à peine effleuré par les voluptés de l’Italie, se révéla une dernière fois, plein de tendresse, de chasteté, de candeur. ÉMILE MALE 1. Buste de l’église de la Bénissons-Dieu (Loire) : P. Vitry, Michel Colombe et la sculpture française de son temps, Paris, 1901, p. 466. 2. Reproduit dans la Gazette des Beaux-Arts, 1902, t. I, p. 192.