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Page:Gazette des Beaux-Arts, vol 31 - 1904.djvu/54

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LA MINIATURE A L’EXPOSITION DES PRIMITIFS 49 Pair de l’Ile-de-France. Je n’en vois pas un seul qui ne soit fidèle à nos traditions. André Beauneveu peint des Prophètes en grisaille sur des fonds de couleur, comme les miniaturistes de Charles V1. Les frères de Limbourg enluminent une Bible moralisée en s’inspi¬ rant d’un modèle qui avait été imaginé en France au xme siècle2. Tous adoptent l’iconographie nouvelle qui était née chez nous au temps de Charles V. Il est donc parfaitement légitime de considérer leurs œuvres comme françaises. Ce serait une erreur d’attacher une extrême importance à la nationalité des artistes d’alors. Il suffit de savoir dans quel milieu ils ont vécu. Tous les artistes qui venaient à Paris travaillaient à la manière française. Tous peuvent être reven¬ diqués par la France. C’est une des fautes de Courajod d’avoir insisté outre mesure sur l’origine flamande de quelques-uns de nos maîtres du xivc siècle. Ne se sont-ils pas tous mis à notre école? Et d’ailleura, que pouvaient-ils nous apporter de nouveau, eux qui, dans leur pays, n’avaient pas d’autre art que le nôtre? Même ceux qui nous apportent quelque chose, comme les Italiens qui travaillaient pour les ducs 3, ou les Flamands voyageurs qui avaient vu l’Italie4, mêlent si bien leur manière à la nôtre qu’on ne la discerne plus. Le fameux Térence du duc de Berry'est au moins aussi Français qu’italien. On entrevoit dans les Heures de Chantilly plus d’un souvenir de l’art italien, mais tout cela fondu en un tout harmonieux qui est l’art de Paris, au commencement du xve siècle. De même on serait embarrassé de dire ce qui est proprement italien dans les premières pages du Josèphe du duc de Berryc, qu’un vieil inventaire qualifie d’« ouvrage de Lombardie ». Toutes ces œuvres, nées à Paris, nous appartiennent. 1. Catalogue, n° 67 (franç. 13091). 2. Catalogue, n° 88 (franç. 166). M. Bouchot voudrait donner à Jacques Cône la première partie de cette Bible,qu’on attribuait plus volontiers jusqu’ici aux Limbourg, à cause des analogies qu’elle présente avec le livre d’Heures de Chan¬ tilly. 3. Par exemple Pierre de Vérone. Les deux courtiers lombards Dîne et Jacques Raponde fournissaient des livres au duc de Bourgogne et pouvaient avoir dans leurs ateliers des peintres italiens. 4. Jacques Cône, originaire de Bruges, mais qui travaillait à Paris, avait fait un voyage à Milan. 5. Catalogue, n° 62 (latin 7907 a). Voir aussi le Térence de FArsenal récem¬ ment exposé dans une des vitrines où se trouvent les plus beaux manuscrits de cette Bibliothèque. 6. Catalogue,n° 128 (franç. 247). Les premières miniatures seules sont du temps du duc de Berry; le reste est de Fouquet. XXXII. — 39 PÉltIODE.\t7