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Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/38

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La popularité acquise au premier Faust a pu donner depuis quelque intérêt à la traduction de ces morceaux ; mais ceux que nous avons omis, et qui, en Allemagne même, ont nui à la compréhension et au succès de tout l’ouvrage, auraient laissé moins encore à la traduction. Le passage que nous allons citer de Gœthe lui-même, et qui se rencontre dans ses Mémoires, est à la fois la critique d’une certaine poésie de mots plutôt que d’idées, et l’absolution de notre système de travail, si nous avons réussi à atteindre à la fois l’exactitude et l’élégance.

« Honneur sans doute au rythme et à la rime, caractères primitifs et essentiels de la poésie. Mais ce qu’il y a de plus important, de fondamental, ce qui produit l’impression la plus profonde, ce qui agit avec le plus d’efficacité sur notre moral dans une œuvre poétique, c’est ce qui reste du poëte dans une traduction en prose ; car cela seul est la valeur réelle de l’étoffe dans sa pureté, dans sa perfection. Un ornement éblouissant nous fait souvent croire à ce mérite réel quand il ne s’y trouve pas, et ne le dérobe pas moins souvent à notre vue quand il s’y trouve : aussi, lors de mes premières études, préférais-je les traductions en prose. On peut observer que les enfants se font un jeu de tout : ainsi le retentissement des mots, la cadence des vers les amusent, et, par l’espèce de parodie qu’ils en font en les lisant, ils font disparaître tout l’intérêt du plus bel ouvrage. Je croirais une traduction d’Homère en prose fort utile, pourvu qu’elle fût au niveau des progrès de notre littérature. »


Gœthe, — Dichtung und Warheit.