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Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/456

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che. Vous avez été encore fort amusant, mon cher ami : c’était toujours la même humeur fantasque et capricieuse qu’autrefois ; seulement, ménagez-vous sous le rapport de la boisson. »

Et le petit-maître aux jambes d’araignée lui prit la main ; elle le suivit, en riant, dans le salon.

« Perdue à jamais ! » m’écriai-je.

« Eh ! sans doute, Codille, mon cher ! » observa une bête qui jouait à l’ombre.

Je me précipitai dehors… dehors, dans la nuit orageuse !…


II. — LA SOCIÉTÉ DANS LE CABARET.


Il peut être fort agréable de se promener de long en large sous les tilleuls, mais non pas dans la nuit de la Saint-Sylvestre, par un froid pénétrant et une neige battante. C’est une réflexion que je fis, étant nu-tête et sans manteau, quand je sentis un vent glacé envelopper mon corps tout brûlant de fièvre. Je traversai dans cet état le pont de l’Opéra, et, passant devant le château, je me détournai et pris par le pont des Écluses en laissant la Monnaie derrière moi.

J’arrivai dans la rue des Chasseurs, près du magasin de Thiermann : les appartements étaient fort bien éclairés ; j’allais entrer, car j’étais transi de froid, et je sentais le besoin de m’abreuver à longs traits de quelque liqueur forte. En ce moment, une société, tout animée d’une joie bruyante, se précipita hors de la maison : ils parlaient d’huîtres superbes et de l’excellent vin de la comète de 1811.

« Il avait bien raison, s’écria l’un d’eux, que je reconnus pour un officier supérieur des uhlans, celui qui, l’an passé, à Mayence, pestait contre ces faquins d’aubergistes qui n’avaient pas voulu absolument, en 1794, lui servir de leur vin de 1811. »

Tous riaient à gorge déployée. J’étais allé involontairement quelques pas plus loin, et je me trouvai devant un