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Page:Gourmont - Muses d’aujourd’hui, 1910, 3e éd.djvu/292

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tiges fragiles qui s’ouvrent et fleurissent un instant dans l’eau fraîche, et meurent au soir, anonymes. Mais le romantisme a laissé, même dans les âmes les plus saines, les plus sereines, son pollen d’amertume et d’infini. Gillette veut remettre l’amour à sa place, en faire un jeu sans plus d’importance que cela, et le jeu devient terrible et mortel. C’est le seul péché — péché involontaire — de Gillette, dans ce roman aristocratique où on ne pèche pas, de s’être trompée, en élisant momentanément ce Michel, mystique et passionné, qui, lui aussi, se réfugie dans la nouvelle espérance de la mort, consolatrice des névroses. Cette mort, pour elle, ne la flatte ni ne l’attriste : déjà son organisme (dont sa petite conscience n’est en somme que l’inscription inconsciente) redemande de la joie, du sommeil, de l’amour, comme tous les jours. Est-elle responsable de ce suicide ? Est-on responsable de