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Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Histoire, tome I.djvu/191

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planétaires), naquit à Kesch en 1336 ; il égorgea cent mille captifs ; comme il assiégeait Sivas, les habitants, pour le fléchir, lui envoyèrent mille petits enfants portant chacun un koran sur leur tête et criant : Allah ! Allah ! Il fit enlever les livres sacrés avec respect et écraser les enfants sous les pieds des chevaux ; il employa soixante-dix mille têtes humaines, avec du ciment, de la pierre et de la brique, à bâtir des tours à Hérat, à Sebzvar, à Tékrit, à Alep, à Bagdad ; il détestait le mensonge ; quand il avait donné sa parole, on pouvait s’y fier. »

M. Bonaparte n’est point de cette stature. Il n’a pas cette dignité que les grands despotes d’orient et d’occident mêlent à la férocité. L’ampleur césarienne lui manque. Pour faire bonne contenance et avoir mine convenable parmi tous ces bourreaux illustres qui ont torturé l’humanité depuis quatre mille ans, il ne faut pas faire hésiter l’esprit entre un général de division et un batteur de grosse caisse des Champs-Élysées ; il ne faut pas avoir été policeman à Londres ; il ne faut pas avoir essuyé, les yeux baissés, en pleine cour des pairs, les mépris hautains de M. Magnan ; il ne faut pas être appelé pick-pocket par les journaux anglais ; il ne faut pas être menacé de Clichy ; il ne faut pas, en un mot, qu’il y ait du faquin dans l’homme.

Monsieur Louis-Napoléon, vous êtes ambitieux, vous visez haut, mais il faut bien vous dire la vérité. Eh bien, que voulez-vous que nous y fassions ? Vous avez eu beau, en renversant la tribune de France, réaliser à votre manière le vœu de Caligula : je voudrais que le genre humain n’eût qu’une tête pour le pouvoir décapiter d’un coup ; vous avez eu beau bannir par milliers les républicains, comme Philippe III expulsait les maures et comme Torquemada chassait les juifs ; vous avez beau avoir des casemates comme Pierre le Cruel, des pontons comme Hariadan, des dragonnades comme le père Letellier, et des oubliettes comme Ezzelin III ; vous avez beau vous être parjuré comme Ludovic Sforce ; vous avez beau avoir massacré et assassiné en masse comme Charles IX ; vous avez beau avoir fait tout cela ; vous avez beau faire venir tous ces noms à l’esprit quand on songe à votre nom : vous n’êtes qu’un drôle. N’est pas un monstre qui veut.