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Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome II.djvu/211

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L’autre fait le peuple puissant.
La Gloire, qui n’est pas l’aînée,
N’est plus armée et couronnée ;
Ni pavois, ni sceptre oppresseur ;
La Gloire n’est plus décevante,
Et n’a plus rien dont s’épouvante
La Liberté, sa grande sœur !


V

Non. S’ils ont repoussé la relique immortelle,
C’est qu’ils en sont jaloux ! qu’ils tremblent devant elle !
Qu’ils en sont tout pâlis !
C’est qu’ils ont peur d’avoir l’empereur sur leur tête,
Et de voir s’éclipser leurs lampions de fête
Au soleil d’Austerlitz !

Pourtant, c’eût été beau ! — Lorsque, sous la colonne,
On eût senti présents dans notre Babylone
Ces ossements vainqueurs,
Qui pourrait dire, au jour d’une guerre civile,
Ce qu’une si grande ombre, hôtesse de la ville,
Eût mis dans tous les cœurs !

Si jamais l’étranger, ô cité souveraine,
Eût ramené brouter les chevaux de l’Ukraine
Sur ton sol bien-aimé,
Enfantant des soldats dans ton enceinte émue,
Sans doute qu’à travers ton pavé qui remue
Ces os eussent germé !

Et toi, colonne ! un jour, descendu sous ta base,
Le pèlerin pensif, contemplant en extase
Ce débris surhumain,
Serait venu peser, à genoux sur la pierre,