Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 2.djvu/217

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Ils épouvantaient l'homme et la terre méchante ; Et depuis cinq mille ans, pendant que l'aube chante Et que la fleur verse l'encens, Le genre humain qui passe et que le temps dénombre Entend, dans la caverne effrayante de l'ombre, Gronder ces livres rugissants. Mais le passé s'en va. Regarde-nous ; nous sommes Un autre Adam, une autre Ève, de nouveaux hommes Nous bénissons quand nous souffrons. Hier vivait d'horreur, de deuil, de sang, de fange ; Hier était le monstre et Demain sera l'ange ; Le point du jour blanchit nos fronts.

Deux êtres sont en nous : l'un ailé, l'autre immonde ; L'un montant vers Dieu ; l'autre ombre et tache du monde, Se ruant dans d'infâmes lits ; Et, pendant que le corps, marchant sur des semelles, Vil, abject, boit l'opprobre et la lie aux gamelles, L'âme boit la rosée aux lys.