Page:Hugo - La Légende des siècles, 2e série, édition Hetzel, 1877, tome 2.djvu/337

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ce fut l'enfant. La nuit pour eux n'était point noire.
L'aïeul faisait penser Paul, qui le faisait croire.
On eût dit qu'échangeant leur âme en ce beau lieu,
Chacun montrait à l'autre un des côtés de Dieu.
Ils mêlaient tout, le jour leurs jeux, la nuit leurs sommes.
Oh ! quel céleste amour entre ces deux bonshommes !
Ils n'avaient qu'une chambre, ils ne se quittaient pas ;
Le premier alphabet, comme le premier pas,
Quelles occasions divines de s'entendre !
Le grand-père n'avait pas d'accent assez tendre
Pour faire épeler l'ange attentif et charmé,
Et pour dire : Ô mon doux petit Paul bien-aimé !
Dialogues exquis ! murmures ineffables !
Ainsi les oiseaux bleus gazouillent dans les fables.
— Prends garde, c'est de l'eau. Pas si loin. Pas si près.
Vois, Paul, tu t'es mouillé les pieds. — Pas fait exprès.
— Prends garde aux cailloux. — Oui, grand-père. — Va dans l'herbe.
Et le ciel était pur, pacifique et superbe,
Et le soleil était splendide et triomphant
Au-dessus du vieillard baisant au front l'enfant.

Le père, ailleurs, vivait avec son autre femme.
C'est en vain qu'une morte en sa tombe réclame,
Quand une nouvelle âme entre dans la maison.
De sa seconde femme il avait un garçon,
Et Paul n'en savait rien. Qu'importe ! Heureux, prospère,