Ils vont ! l’espace est morne et sourd ; leurs envergures
Font dans l’affreux brouillard de lugubres figures.
Pas d’ancres et pas d’avirons.
L’hiver les bat, la grêle aux flots pressés les crible,
Et la pluie effarée à la crinière horrible
Tord les nuages sur leurs fronts.
Chiourmes de la mort, égouts, fosses communes !
On les voit vaguement comme de sombres lunes.
Rien n’arrête leur vol hideux.
Au-dessus d’eux la brume et l’horreur se répandent,
La profondeur les hait ; les précipices pendent
Dans les gouffres au-dessous d’eux.
Ils traversent, allant où l’ouragan les lance,
Tantôt une tempête, et tantôt un silence ;
L’univers vivant et profond
Ne les aperçoit pas dans les brouillards sans bornes ;
Ils passent dans la nuit comme des faces mornes
Qui paraissent et qui s’en vont.
Page:Hugo - La Légende des siècles, 3e série, édition Hetzel, 1883.djvu/61
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