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Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/107

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du passé en sont là ; Rabelais s’empare de cette situation ; il la constate ; il prend acte de ce ventre qui est le monde. La civilisation, n’est plus qu’une masse, la science est matière, la religion a pris des flancs, la féodalité digère, la royauté est obèse ; qu’est-ce que Henri VIII ? une panse. Rome est une grosse vieille repue ; est-ce santé ? est-ce maladie ? C’est peut-être embonpoint, c’est peut-être hydropisie ; question. Rabelais, médecin et curé, tâte le pouls à la papauté. Il hoche la tête, et il éclate de rire. Est-ce parce qu’il a trouvé la vie ? non, c’est parce qu’il a senti la mort. Cela expire en effet. Pendant que Luther réforme, Rabelais bafoue. Lequel va le mieux au but ? Rabelais bafoue le moine, bafoue l’évêque, bafoue le pape ; rire fait d’un râle. Ce grelot sonne le tocsin. Eh bien, quoi ! J’ai cru que c’était une ripaille, c’est une agonie ; on peut se tromper de hoquet. Rions tout de même. La mort est à table. La dernière goutte trinque avec le dernier soupir. Une agonie en goguette ; c’est superbe. L’intestin colon est roi. Tout ce vieux monde festoie et crève. Et Rabelais intronise une dynastie de ventres : Grangousier, Pantagruel et Gargantua. Rabelais est l’Eschyle de la mangeaille ; ce qui est grand, quand on songe que manger c’est dévorer. Il y a du gouffre dans le goinfre. Mangez