Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/333

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croit à Mulmutius, à Cinigisil, à Céolulfe, à Cassibelan, à Cymbeline, à Cynulphus, à Arviragus, à Guiderius, à Escuin, à Cudred, à Vortigerne, à Arthur, à Uther Pendragon, il a bien le droit de croire au roi Lear, et de créer Cordelia. Ce terrain adopté, ce heu de scène désigné, cette fondation creusée, il prend tout, et il bâtit son œuvre. Construction inouïe. Il prend la tyrannie, dont il fera plus tard la faiblesse, Lear ; il prend la trahison, Edmond ; il prend le dévouement, Kent ; il prend l’ingratitude qui commence par une caresse, et il donne à ce monstre deux têtes, Goneril, que la légende appelle Gornerille, et Regane, que la légende appelle Ragaii ; il prend la paternité ; il prend la royauté ; il prend la féodalité ; il prend l’ambition ; il prend la démence qu’il partage en trois, et il met en présence trois fous, le bouffon du roi, fou par métier, Edgar de Glocester, fou par prudence, le roi, fou par misère. C’est au sommet de cet entassement tragique qu’il dresse et penche Cordelia.

Il y a de formidables tours de cathédrales, comme, par exemple, la giralda de Séville, qui semblent faites tout entières, avec leurs spirales, leurs escaliers, leurs sculptures, leurs caves, leurs cœcums, leurs cellules aériennes, leurs chambres sonores, leurs cloches, leur plainte, et