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Page:Hugo - William Shakespeare, 1864.djvu/420

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à adorer son monstre, de l’air dont on attend un vengeur. Il glorifie le mal en louchant vers l’ombre. C’est dans l’ombre qu’est Harmodius. Machiavel, ce metteur en scène des attentats princiers, ce domestique des Médicis et des Borgia, avait dans sa jeunesse été mis à la torture pour avoir admiré Brutus et Cassius. Il avait comploté peut-être avec les Soderini la délivrance de Florence. S’en souvient-il ? Continue-t-il ? Un conseil de lui est suivi, comme l’éclair, d’un grondement ténébreux dans la nuée, prolongement inquiétant. Qu’a-t-il voulu dire ? A qui en veut-il ? Le conseil est-il pour ou contre celui à qui il le donne ? Un jour, à Florence, dans le jardin de Cosmo Ruccelaï, étant présents le duc de Mantoue et Jean de Médicis qui commanda plus tard les Bandes Noires de Toscane, Varchi, l’ennemi de Machiavel, l’entendit qui disait aux deux princes : — Ne laissez lire aucun livre au peuple, pas même le mien. Il est curieux de rapprocher de ce mot l’avis donné par Voltaire au duc de Choiseul, conseil au ministre, insinuation au roi : « Laissez les badauds lire nos sornettes. Il n’y a point de danger à la lecture, monseigneur. Qu’est-ce qu’un grand roi comme le roi de France peut craindre ? Le peuple n’est que racaille, et les livres ne sont que niaiserie. » — Ne laissez