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LEUR CARACTÈRE.

grandes journées dans lesquelles ils s’étaient distingués ; des empires et royaumes qu’ils avaient fondés ; de leur conduite de l’égard des Arabes hilaliens, lorsque ceux-ci envahirent l’Ifrîkïa au cinquième siècle de l’hégire ; de leurs procédés envers les Beni-Hammad d’El-Calâ, et de leurs rapports avec les Lemtouna de Tlemcen et de Tèhert, rapports tantôt amicaux, tantôt hostiles ; ayant mentionné les concessions de territoire que les Beni-Badîn obtinrent des Almohades dans le Maghreb, et raconté les guerres que firent les Beni-Merîn aux successeurs d’Abd-el-Moumen, nous croyons avoir cité une série de faits qui prouvent que les Berbères ont toujours été un peuple puissant, redoutable, brave et nombreux ; un vrai peuple comme tant d’autres dans ce monde, tels que les Arabes, les Persans, les Grecs et les Romains.

Telle fut en effet la race berbère ; mais, étant tombée en décadence, et ayant perdu son esprit national par l’effet du luxe que l’exercice du pouvoir et l’habitude de la domination avaient introduit dans son sein, elle a vu sa population décroître, son patriotisme disparaître et son esprit de corps et de tribu s’affaiblir au point que les diverses peuplades qui la composent sont maintenant devenus sujets d’autres dynasties et ploient, comme des esclaves, sous le fardeau des impôts.

Pour cette raison beaucoup de personnes ont eu de la répugnance à se reconnaître d’origine berbère, et cependant, on n’a pas oublié la haute renommée que les Auréba et leur chef Koceila s’acquirent à l’époque de l’invasion musulmane. On se rappelle aussi la vigoureuse résistance faite par les Zenata, jusqu’au moment où leur chef Ouezmar-Ibn-Soulat fut conduit prisonnier à Médine pour être présenté au khalife Othman-Ibn-Affan. On n’a pas oublié leurs successeurs, les Hoouara et les Sanhadja, et comment les Ketama fondèrent ensuite une dynastie qui subjugua l’Afrique occidentale et orientale, expulsa les Abbacides de ce pays et gagna encore d’autres droits à une juste renommée. Citons ensuite les vertus qui font honneur à l’homme et qui étaient devenues pour les Berbères une seconde nature ; leur empressement à s’acquérir des qualités louables, la noblesse d’âme