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Page:Janin - La Bretagne, 1844.djvu/708

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blonde ou verte des blés. J’ai vu dans l’île de Céos un bas-relief antique qui représentait les Néréides attachant des festons au bas de la robe de Cérès.

« Dans les paysages intérieurs du continent, le plan terrestre et le plan céleste se regardent immobiles ; dans les vues maritimes, le roulant azur des flots est renfermé sous l’azur fixe du firmament. De là un contraste frappant ; l’hiver, du haut des falaises, le tableau est de deux couleurs tranchées : la neige, qui blanchit la terre, noircit la mer.

« Pour jouir d’un rare spectacle, il faut voir en Bretagne le soleil, et surtout la lune, se lever sur les forêts et se coucher sur l’Océan.

« Établie, par Dieu, gouvernante de l’abîme, la lune a ses nuages, ses vapeurs, ses longs rayons, ses ombres portées comme le soleil, mais comme lui elle ne se retire pas solitaire ; un cortège d’étoiles l’accompagne. À mesure qu’elle descend au bout du ciel, elle accroît son silence, qu’elle communique à la mer. Bientôt elle touche à l’horizon, l’intersecte, ne montre plus que la moitié de son front, qui s’assoupit, s’incline et disparaît dans la molle intumescence d’un lit de vagues. Les astres voisins de leur reine, avant de plonger à sa suite au sein de l’onde, s’arrêtent, un moment suspendus sur la cime des îlots et des écueils, phares éternels d’une terre inconnue ! La lune n’est pas plutôt couchée, qu’un souffle venant du large, brise l’image des constellations, comme on éteint des flambeaux après une solennité. »