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OPINION D’ÉCHALOTE

Paillons et le paternel M. Plusch qui savait si bien la comprendre. À qui pouvait-elle se confier dans cette ville mi-anglaise, mi-française, où ceux qui se disaient ses compatriotes parlaient normand ?

Quand on songeait qu’un épicier, voisin de la pension Bichette, venait de piquer, sur un sac de lentilles, un écriteau où s’étalait cette annonce : Cercueil d’occasion à céder ! Le père de l’épicier avait dû mourir, puis il avait changé de décision. Le fils qui, précautionneux, s’était déjà muni du cercueil paternel, n’entendait pas immobiliser plus longtemps un capital utile à ses mélasses.

Que faisait Échalote dans un tel milieu ? À quel citoyen s’adresser pour la vente d’un peu de baume pour sa neurasthénie ? Sur quelle poitrine reposer sa tête blonde ? Où trouver un cœur qui s’emparerait du sien ? La triste et amputée Marie-Louise avait écouté ses doléances et compati à ses regrets, mais c’était peu de chose pour calmer l’impatience d’une petite personne avide, et quand, le soir, la cantatrice retrouvait son Mulet, Échalote avait l’impression que, sous la calotte des deux, chacune avait son chacun, beau ou laid, riche ou pauvre, protecteur ou protégé et qu’elle seule était célibataire.