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le chien d’or

de la belle de la Nouvelle-France… la belle Amélie de Repentigny !

IX.

Le Gardeur, la tête appuyée sur sa main, l’air gaillard, et sa coupe déjà remplie, attendait la santé de Deschenaux. Au nom de sa sœur il se leva comme s’il avait été mordu par un serpent, jeta sa coupe à la tête de Deschenaux et tira son épée.

— Mille tonnerres vous écrasent ! hurla-t-il, comment osez-vous profaner ce nom sacré, Deschenaux ? Rétractez-vous ! ou vous allez boire une santé de sang ! rétractez-vous !

Les convives se levèrent terrifiés. Le Gardeur voulait se précipiter sur Deschenaux, et Deschenaux, furieux de l’insulte qu’il venait de recevoir, l’attendait l’épée au poing. Plusieurs s’interposèrent, Le Gardeur les repoussa.

L’Intendant qui ne manquait jamais de courage, ni de présence d’esprit, rejeta Deschenaux sur son siège, et lui saisit le bras.

— Êtes-vous fou, Deschenaux ? lui dit-il. Vous savez qu’Amélie est sa sœur, et qu’il lui a voué un culte profond !… Rétractez la santé, elle était inopportune.

Deschenaux s’obstina une minute, mais il dut enfin céder, car l’Intendant avait une très grande influence sur lui.

— Ce damné de Repentigny ! dit-il, je voulais seulement rendre hommage à sa sœur… Qui aurait pensé qu’il allait prendre la chose de cette façon ?

— Tous ceux qui le connaissent, excepté vous, continua l’Intendant. Si vous voulez porter une santé à mademoiselle de Repentigny, attendez qu’il se soit donné corps et âme à la grande compagnie ; alors, soyez en sûr, il ne se souciera pas plus de l’honneur de sa sœur que vous ne vous occupez de l’honneur de la vôtre.

— Mais l’insulte ? Il m’a blessé avec le gobelet,