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le chien d’or

Les gentilshommes s’inclinèrent en la remerciant. Alors Philibert aperçut la jolie Zoé, les yeux attachés sur une grande feuille de papier, marquée d’un sceau rouge ; elle cherchait à débrouiller l’écriture assez bizarre du vieux notaire.

Zoé, comme les autres filles de sa condition, avait reçu au couvent une teinture des principales connaissances. Cependant, bien que le papier qu’elle étudiait avec tant d’attention fût son contrat de mariage, elle avait de la peine à faire le triage des quelques bribes de bon sens, qui flottaient sur cette mer de verbiage légal. Avec sa parfaite intelligence des prétentions du meum et du tuum, elle en arriva vite, cependant, à la conclusion fort satisfaisante que son contrat de mariage avec l’honnête Jean Lachance n’était pas sans mérite.

Elle surprit le regard de Philibert et rougit jusque dans le blanc des yeux ; elle rejeta vivement le papier et répondit, par un salut, à l’adieu des gentilshommes, qui s’éloignèrent d’une course rapide, sur la grande route de la ville, après avoir abreuvé leurs chevaux.

IV.

Babet Le Nocher, vêtue de sa robe neuve, assez courte pour laisser paraître dans leurs bas de laine, deux pieds si mignons, que bien des duchesses en auraient été jalouses, était assise sur le banc de la gondole, et tricotait. Elle portait ses cheveux noirs selon la mode dont parle le grave Kalm, dans sa relation de la Nouvelle-France, quand il dit ; Les paysannes portent toutes leurs cheveux bouclés. Et comme elles sont jolies ainsi !

— Sur ma vie ! dit-elle à Jean, qui savourait une pipe de tabac canadien, voilà le bel officier qui revient, et aussi vite qu’il s’en est allé !

— Il est évident, ma chère Babet, qu’il marche pour le roi ou pour lui-même. Une belle dame attend son retour avec impatience, ou bien l’a envoyé porter un message. Il n’y a qu’une femme,