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LE CHIEN D’OR

Elle se leva et jeta un coup d’œil à la fenêtre.

Les étoiles scintillantes paraissaient débordantes de vie. Dans l’hémisphère nord, à l’horizon, on voyait le Charriot renversé ; le Bouvier avait conduit son étincelant troupeau dans les plaines éthérées de l’Occident.

Quelques tresses de ses cheveux d’or tombaient négligemment sur ses épaules et sur sa poitrine. Elle s’inclina vers Le Gardeur. Un instant encore, son projet égoïste tomba dans la poussière et elle fut tentée de le fouler aux pieds ; un instant elle eut envie d’être ce qu’il la croyait, lui, une femme sincère et dévouée.

— Lisez ma destinée, Le Gardeur, dit-elle vivement. Vous avez été au séminaire. On dit que les prêtres de cette maison étudient à fond la science des astres, et que leurs élèves y deviennent habiles.

— Je ne regarde que mon ciel à moi : vos yeux, Angélique ! Puis-je le désirer plus beau ? C’est là que je lis ma fortune et mon destin !

XIII.

Angélique était tourmentée par des passions diverses. Elle avait sur les lèvres des paroles de vie et des paroles de mort. Son cœur battait plus fort que la pendule d’or qui était là, près d’elle, sur la table de marbre. Le bon mouvement s’envola encore comme un oiseau effrayé.

— Regardez, Le Gardeur, fit-elle en montrant la constellation de Persée qui s’élevait à l’Orient, voilà mon étoile. Mère Malheur… Vous connaissez mère Malheur ?… Mère Malheur m’a dit que c’était mon étoile, et qu’elle influerait sur ma destinée.

Comme toutes les personnes qui s’abandonnent à leurs passions, Angélique croyait à la fatalité.

Elle montrait Algol, cette étrange étoile qui passe en quelques heures, de l’éclat le plus beau à l’obscurité la plus incompréhensible, et qui a le pouvoir dit-on, de changer en pierre le cœur de l’homme.

— Mère Malheur en a menti ! exclama Le Gardeur,