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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/388

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le chien d’or

laient toujours — et au jeune officier qui l’accompagnait. Elles eurent vite reconnu l’écolier d’autrefois, qui avait si généreusement sauvé la vie à leur jeune maître, et elles se dirent, comme cela entre elles, qu’il venait sans doute à Tilly, pour… pour…

Elles n’achevaient jamais. Le sourire significatif qui répondait à la confidence, affirmait que c’était compris. Et puis, il était devenu un si bel homme, cet élève du séminaire, avec son uniforme brillant et sa vaillante épée ! Et elle, mademoiselle Amélie, elle n’avait jamais détesté entendre prononcer son nom ; bien au contraire !

Les femmes ont vite fait de déduire les conséquences des prémisses, en fait d’amour, et elles ne se trompent pas toujours, tant s’en faut.

Derrière la maison, au-dessus de l’étable et du poulailler, caché aux regards par un épais rideau de feuillage, s’élevait le pigeonnier avec ses doux et amoureux habitants. Ils étaient peu nombreux, mais d’un riche plumage et d’une beauté remarquable. Il ne fallait pas laisser la roucoulante famille s’agrandir trop, à cause des champs de blé qu’elle aurait mis à sac.

Devant le manoir, au milieu des arbres chargés de verdure et palpitants de vie, s’élevait un pin d’une grande longueur, nu et droit comme une flèche d’église. Il n’avait plus d’écorce, plus de rameaux, excepté au faîte, un bouquet. Un pavillon et des bouts de rubans flottaient au-dessous de cet énorme bouquet vert qui le couronnait, et la poudre du canon en avait marqué de taches noires l’aubier encore tout éclatant de blancheur.

C’était un mai que les habitants avaient planté, pour rendre hommage à la dame de Tilly.

XII.

Planter le mai, cela se faisait dans la Nouvelle-France, à chaque retour de la belle saison, — le premier de mai, quand on voulait payer un tribut d’hommage à un supérieur.