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CHAPITRE XXXI.

VOS PAROLES MIELLEUSES NE VOUS SERVIRONT DE RIEN.

I.

Grâce à l’actif espionnage de Lisette, Angélique Des Meloises connut bientôt ce qu’avait fait Le Gardeur, dans cette nuit fatale où elle avait froidement désespéré son amour ; elle savait ce qu’il était devenu, depuis que par égoïsme et par ambition, elle avait refusé de lui accorder sa main.

Elle l’aimait encore, et ressentait une peine amère de s’être montrée aussi impitoyable envers lui ; cependant, elle cherchait toujours une consolation dans sa vanité.

La conduite qu’il avait tenue à la taverne de Menut l’affligeait un peu et la flattait beaucoup. Elle éprouvait un certain orgueil à la pensée qu’il l’aimait jusqu’à se faire mourir de désespoir… et pourtant, elle n’aurait pas voulu sa mort. Tous les autres sacrifices ; mais celui-là, c’était réellement un peu trop !

Elle ne voulait pas le perdre entièrement. Elle espérait le tenir enchaîné dans ses filets de soie, le fasciner toujours par son étrange beauté. Ce n’était pas sa faute si elle ne pouvait l’oublier tout à fait. Cet amour était dans son cœur à côté de l’ambition ; il devait y rester. C’était le ciel ou l’enfer qui l’y avait mis : n’importe ! Elle n’était pas obligée, assurément, de renoncer aux brillantes joies de l’avenir qu’elle voyait étinceler devant ses yeux, comme les millions de lucioles des prairies dans les nuits d’été !