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le chien d’or

attendue qui aurait lié Bigot, cette parole pourtant si facile à dire, ne venait toujours pas !

La semence de jalousie que ses deux jeunes amies avaient jetée dans son âme tout à l’heure, germait prodigieusement. Elle ne savait plus que dire ni que faire. Un mouvement de fureur l’emporta soudain et elle frappa Bigot en pleine poitrine :

— Vous mentez, Bigot, hurla-t-elle, vous ne m’avez jamais portée dans votre cœur !… C’est la dame de Beaumanoir que vous avez gardée là, précieusement !… Vous lui avez donné la place que vous m’aviez promise !… Si je suis une perle de prix, vous me donnez à cette femme pour qu’elle se pare davantage ! Mon abaissement est son triomphe !…

Angélique était superbe à voir dans sa fureur.

Bigot recula tout stupéfait devant cette main mignonne qui le frappait. S’il eut été touché au visage, il n’aurait jamais pardonné. Ainsi le veut la dignité de l’homme. Frappé à la poitrine, il éclata de rire et saisit la jolie main qui s’oubliait ainsi. Angélique la retira violemment.

Elle regarda Bigot d’une façon menaçante. Il lui dit qu’il n’était pas plus effrayé qu’offensé. De fait, cette violente jalousie lui plaisait ; il en était tout fier. Il aimait ces tempêtes de l’amour ; ces nuages sombres sur des fronts de vingt ans, ces éclairs dans des yeux tendres, ces tonnerres sur des lèvres roses, et finalement, ce torrent de larmes qui tombait sur lui et à cause de lui !

Jamais il n’avait vu une aussi belle Furie qu’Angélique Des Meloises.

— Angélique ? dit-il, c’est de la folie toute pure, cela ; que signifie cette explosion de rage ? Doutez-vous donc véritablement de ma sincérité ?

— Oui ! j’en doute ! plus que cela, je n’y crois pas du tout. Tant que vous garderez une maîtresse à Beaumanoir, je considérerai vos promesses comme des mensonges et votre amour comme un outrage !

— Angélique, vous êtes un peu trop violente, un