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LE NÉPAL


mente. Une date précise, positive, se dégage de ce brouillard et s’inscrit au fronton d’une période nouvelle. L’an 880 de J.-C. inaugure l’ère du Népal.

Depuis longtemps déjà le Népal avait été initié par l’Inde à l’usage d’une ère locale. L’ambition des dynastes indiens, empereurs ou roitelets, allait à fonder une ère propre, qui perpétuât leur souvenir ; l’emploi d’une ère distincte était tenu pour un symbole d’indépendance, de puissance fière et libre ; c’était une sorte de drapeau national, marqué aux armes d’une dynastie. Parmi tant de difficultés où se débat l’histoire de l’Inde, la multiplicité des ères est un principe de confusion inextricable. Une série de rois oscille souvent dans la chronologie, au hasard de la mode, en attendant le synchronisme décisif. Les Guptas, qui dominent l’histoire indienne pendant cent cinquante ans, étaient tiraillés, il y a quinze ans encore, entre le ier et le IVe siècle de l’ère chrétienne. L’origine même des ères les plus populaires échappe à l’historien ; nous ignorons encore les circonstances qui firent naître en 57 av. J.-C. l’ère Vikrama, en 78 ap. J.-C. l’ère çaka, aussi répandues cependant dans l’Inde contemporaine que dans l’Inde du moyen âge. Les Liččhavis du Népal avaient fondé ou introduit dans la vallée une ère qui partait, si mes calculs sont exacts, de l’an 111 J.-C ; au début du VII° siècle, ils avaient dû accepter comme une marque de vassalité l’ère des conquérants tibétains. L’an 880 consacre officiellement la rupture du lien de vasselage ; le Népal échappe au Tibet que déchirent les passions religieuses ; et une nouvelle dynastie se substitue aux Liččhavis : les Mallas.

Les Mallas, comme les Liččhavis, sont les héritiers plus ou moins légitimes d’un nom antique, consacré par la biographie du Bouddha. Au temps où vivait le Maître, les Mallas formaient une confédération de tribus encore peu avancées en civilisation ; c’est sur leur territoire que les