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CHAPITRE IX

Comme les nuages etc. sont l’Obstruction des rayons, puisqu’ils n’éclairent plus ; ainsi la perversité des créatures est l’Obstruction des connaissances des Bouddhas. L’abondance excessive[1] des cinq Fanges[2] des créatures les empêche d’être des Récipients.

35. L’effet de la poussière sur une étoffe, c’est que la couleur a son lustre ou ne l’a pas ; ainsi, par l’effet de la Projection[3] sur la Délivrance, la Connaissance a son lustre ou ne l’a pas.

L’effet de la poussière sur une étoffe, c’est que par endroits la couleur a son lustre, par endroits elle ne l’a pas. Exactement ainsi, la qualité toute particulière de l’Intromission de la Force à exécuter le vœu antérieur fait que dans la Libération des Bouddhas la Connaissance a son lustre ; dans la Libération des Auditeurs et des Bouddhas-pour-soi, elle n’a pas son lustre.

  1. Utsada. Terme bouddhique, que Böhtlingk rend à tort par « vorzüglich, hervorragend, excellent ». La trad. tibétaine cas pa che ba marque bien le sens de « abondant », comme aussi le chinois to « nombreux » . Le pali ussada prend aussi le sens de « foule, multitude » (Morris, J. P. T. S., 1887, p. 144). — Cf. aussi Ç. sam. 248, 5 utsadatva = excès. — Comm. l. 2, lire satvânâm abhâjana°.
  2. Kaṣâya. Tib. sñigs ma « malpropreté » ; chin. tchou « boue ». Les cinq kaṣâya (M. Vy. § 124) sont : âyus « longévité » ; dṛṣṭi « vue » ; kleça « souillure » ; sattva « les créatures » ; kalpa « éon ». La « fange » consiste en ce que ces cinq catégories vont en dégénérant.
  3. Âvedha. Le mot est donné par B. R. (supplément au vol. b-m) avec une référence au Mahâ Bhârata II, 2367 : tasya vâkyaṃ sarve praçaçaṃsus… celâvedhâṃç câpi cakruḥ ; ils donnent comme traduction « schütteln, agiter », et rapportent tout au long la glose fort embarrassée de Nilakaṇṭha qui analyse celâḥ = preṣyâḥ « domestiques » et vedhân « les buts ». La traduction de P. C. Roy, docile à Nilakaṇṭha, écrit : « they made signs unto one another by motions of their eyes and lips ». Cependant les prâñcaḥ, au témoignage de Nilakaṇṭha lui-même, fournissaient une autre interprétation : celâvedhân vastrabhrâmaṇânîti prâñcaḥ ; « celâvedha » signifie « faire tournoyer les vêtements ». Les prâñcaḥ avaient raison. Celâvedha est ici l’équivalent de celukkhepa, fréquent en particulier dans le Jâtaka pali ; c’est, en signe d’approbation (praçaçaṃsuḥ), lancer en l’air une pièce du costume, comme nous faisons encore du chapeau. — La même expression reparaît, XVIII, 88 : purvakarmâvedha. Le comm. de l’Abh. koça (cité Madh. v. 302, n. 3) donne karmâvedha comme le synonyme de karmâkṣepa (comm. sup. celâvedha = pali celukkhepa ; vyadh° = kṣip°) : « C’est le karmâvedha qui par sa force fait aller à telle ou telle destination, enfers, etc. ». « L’âkṣepa du vœu » (praṇidhâna, comme dans notre texte du Bodhisattva produit ses fruits par projection tournante (bhramana-âkṣepa ; cf. sup. celâvedha = vastrabhrâmaṇa) « comme la roue du potier » (Bodhic., cité Madh. v.). — Le tib. traduit ’phen pa « lancer ». Le chinois introduit la glose praṇidhânabala dans le vers même. — La M. Vy. cite âvedha, § 245, 1127.

    Aux deux hémistiches, réunir °citrâvicitratâ.