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Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/19

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préface

La notion que nous avons aujourd’hui de l’histoire des hommes a fait un grand pas en avant du siècle dernier. Le combat des philosophes contre la superstition avait relégué au rang des choses finies et méprisables tout le poétique bagage des croyances populaires, sans paraître se douter qu’il y avait là un gros chapitre essentiel dans l’histoire de la pensée. Grâce à l’école nouvelle dont MM. Littré, Renan, et autres éminents écrivains nous ont révélé l’esprit, nous arrivons aujourd’hui à regarder l’histoire des fictions comme l’étude de l’homme même, puisque toute fiction est l’idéalisation d’une impression reçue dans un certain temps et dans un certain milieu historiques. Plus on recule dans le passé, plus la fiction tient de place ; à ce point même qu’elle est la seule histoire des premiers âges. Elle seule nous révèle cet homme primitif qui semblait doué de peu de raison, mais qui s’éveillait à la vie intellectuelle par une horrible et magnifique exubérance d’imagination. Grâce à cette faculté, l’homme n’a jamais été un sauvage proprement dit, puisqu’il n’a pu devenir l’homme qu’à la condition de porter en lui un idéal, d’autant plus démesuré qu’il était plus ignorant des lois de la nature. C’est dans ce sens que les prodiges et les miracles ne sont pas de simples impostures. Les hallucinés sont des types humains très-réels, et les merveilles du rêve sont encore des actes humains dont la suppression dans l’histoire anéantirait le sens de l’histoire.

Je ne dirai pas que la disparition de ces types et la perte de cette faculté de voir par les yeux du corps les fan-