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Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/80

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du vieux temps

ne serait-il pas un rayon (sic) de cette barbarie qui aurait percé jusqu’à nous ? »

Disons, en passant, que cet usage de tuer les vieillards n’était pas particulier aux Gaulois ; on le retrouve chez beaucoup de peuples anciens. Encore, dans ces derniers temps, les Battaks de Sumatra, peuplade que l’on dit assez civilisée, mettaient à mort et dévoraient des vieillards dans leurs festins religieux. Aujourd’hui même, les aborigènes de l’île de Vancouver administrent à ceux d’entre eux que l’âge et les infirmités rendent impropres à la guerre et à la chasse une sorte de poison qui les tue instantanément. Cette substance figurait, en 1862, à l’Exposition de Londres, parmi les produits de l’industrie des peuples primitifs.

Le Rouergue et le Quercy connaissent aussi la légende de la Vieille de la mi-carême ; mais, ainsi que nous, ils ne peuvent s’en expliquer ni l’origine, ni le sens : — « Les jeunes enfants vont voir scier en deux la Vieille de la mi-carême… Cet usage subsistait encore avant la révolution dans certaines villes, notamment à Rodez », dit M. Alexis Monteil[1].

Enfin, « dans le Jura, on appelle jours de la Vieille les trois derniers jours de mars et les trois premiers d’avril. Cette Vieille a laissé dans l’esprit des paysans d’une contrée de ce pays une idée indéfinissable ; ils la représentent comme une fée qui court par le temps, c’est-à-dire qui traverse les airs. Ces jours-coïncident avec le lever héliaque d’Andromède et le lever cosmique de la Vierge[2]. »

On découvre des traces de la Vieille de la mi-carême ailleurs qu’en France. En Espagne, par exemple, elle porte le nom de Reina Cuaresma, ou de Reine Carême. — Aussitôt le carnaval expiré, les habitants de Madrid promènent par les rues et les carrefours de la ville une statue représentant

  1. Histoire des Français des divers états, t. VIII, 1re édition.
  2. Mémoires de la Société des antiquaires, t. IV, année 1823.