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Page:Langlois - La decouverte de l'Amerique par les Normands vers l'an 1000. Deux sagas islandaises, 1924.djvu/130

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par le susdit chenal libre, il est amené a l’aller chercher d’abord au Nord.

Sans doute, les conditions glaciaires avaient trompé les marins anciens et leur avait fait imaginer une géographie spéciale, que les portulans et les cartes anciennes nous représentent assez bien (voir fig. 6). Le goût des explorations polaires n’était pas né, les terres glacées inspiraient une sorte de crainte superstitieuse ; les Normands s’y aventuraient bien pour chasser ou pour recueillir les bois flottés, mais ils ne cherchaient pas à savoir si géographiquement il y avait terre, mer ou banquises. L’obstacle formé par la glace limitait pour eux leur monde et leurs connaissances géographiques.

À vrai dire, certains hardis explorateurs, ou le plus souvent des naufragés, avaient bien pénétré assez loin au Nord, dans la région polaire, mais par suite du manque de précisions scientifiques, leurs récits n’apportaient aucune lumière. La conception ancienne était basée sur les apparences, dont le mystère n’a été percé que de nos jours et pas encore en totalité.

De la géographie du xe siècle, nous ne possédons ni document cartographique, ni même descriptif. Dans nombre du portulans ou de cartes très postérieures qui reflètent peut-être les conceptions anciennes, nous voyons le Groenland placé d’une façon souvent arbitraire, soit au Nord-Ouest, soit au Nord et même au Nord-Est de l’Angleterre, mais toujours relié au Nord de la Norvège ou de la Russie[1]. La plupart de ces documents sont muets sur les territoires situés plus à l’Ouest : tels sont Ia carte de Donnus Nicolaus Germanus (1466), la carte de Clavus, la carte de Dacie, Norvège et Gothie du supplément du Ptolémée de 1481-1485, antérieurs à la découverte colombienne. Il y a exception pour deux cartes, d’ailleurs très postérieures, celle de Sigurd Stephanson de 1572, et celle des Zeni de 1557 (Lelewel).

La carte des Zeni, malgré tout ce que ses défenseurs ont pu en dire, étale de telles erreurs, avec un tel cynisme, qu’il est difficile d’y attacher beaucoup de confiance. De plus, elle situe bien des terres au Sud du Groenland, mais ces terres s’appellent

  1. Voir les figures 6 et 7.