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journées de mer, tout au plus, nulle part on ne voit de terme correspondant à semaine ou à mois.

Le seul fait que Karlsefni emmène du Groenland un personnel considérable par rapport aux dimensions de son navire et en plus du bétail et des marchandises, indique bien que le voyage devait être court.

Cette faible distance concorde d’ailleurs assez bien avec d’autres renseignements de la Saga, Leif par exemple, n’aurait pas embarqué des fruits à son bord si la traversée avait dû être longue et difficile.

Si donc nous cherchons, d’après ces données, une terre à peu de distance du Groenland, au Sud ou au Sud-Ouest, nous arrivons immanquablement au Labrador, à Terre-Neuve ou à la rigueur à la Nouvelle-Écosse.

Les descriptions des côtes concordent fort bien avec celles de ces pays. La côte nord-est du Labrador est froide, montagneuse, aride et sauvage, et c’est ainsi qu’on nous dépeint le Helluland.

La partie sud de cette province, au nord du détroit de Belle-Isle et Terre-Neuve, s’accorde bien avec l’aspect donné pour le Markland. Pays peu accidenté, boisé avec des pâturages, eaux poissonneuses, forêts giboyeuses.

Le Bas Saint-Laurent ou la Nouvelle-Écosse ne manquent pas de points ou de régions qui répondent au Vinland. C’est précisément là la difficulté. Lequel ?

La faune et la flore décrites dans les Sagas relèvent bien du décor connu des régions visées, comprises entre le Nord de la Nouvelle-Écosse et le Labrador, pays où le bétail peut paître l’hiver.

Si les Normands avaient été plus loin vers le Sud, en dehors de l’argument chaleur dont nous avons déjà montré la valeur (page 130), ils auraient d’abord dû naviguer un temps appréciable de l’ordre de plusieurs semaines. Nous serions très éloignés alors des chiffres de la Saga. De plus, l’aspect des côtes du New-England, si différent des paysages auxquels ils étaient habitués, si différent même de ceux de Terre-Neuve, n’eût pas manqué de les frapper et leurs descriptions en eussent porté